Des mesures pour éviter que la vague d’inflation n’emporte nos commerces

Les commerces sont les grands oubliés de la crise. Ils font face à de grandes difficultés avec l’augmentation du prix des matières premières, du prix de l’énergie et des salaires. L’Etat doit travailler sur ces différents aspects pour sortir les commerces du marasme.

Les témoignages glaçants de commerçants recevant les premières régularisations fleurissent de plus en plus sur les réseaux sociaux. Le président de l’UCM Pierre-Fréderic Nyst met ainsi en évidence que « des gens qui payaient 2.500 euros par mois en paient aujourd’hui 10.000 », ce sont des messages qui sont très durs et ça risque de s’amplifier. Certains sont toujours protégés par des contrats fixes mais ils arrivent à échéance.

Les mesures prises jusqu’ici par l’Etat n’ont malheureusement pas adressé ces problèmes.

La réduction de la TVA sur l’énergie n’a pas d’impact pour les sociétés et il n’y a pas d’indexation progressive sur les salaires. Cette situation problématique est connue depuis des mois par le gouvernement et nous ne pouvons que constater qu’aucune mesure n’est prête que l’heure est toujours à la réflexion et à la concertation. L’heure devrait pourtant être à l’action et à l’anticipation. Il y a un réel risque d’écroulement de notre économie suite à la non-capacité qu’auraient les PME et les entreprises à ne pas savoir payer leurs factures (dont les factures énergétiques).

Les Engagés proposent de mettre en place une série de mesures urgentes permettant aux commerces et aux entreprises de mieux supporter les conséquences de la crise inflationniste :

  • La création urgente d’un Fonds pour l’Energie pour les commerces et les PME à l’instar des fonds en place pour les particuliers géré par les CPAS (Fonds social de l’Energie) Ce fonds, géré par l’INASTI, viendrait en aide aux entreprises qui ne sont pas en mesure de payer leurs surcouts sous forme de prêt (ou de prise en charge partielle). Il doit permettre aux commerces et aux entreprises de faire face aux problèmes de liquidités et de répartir dans le temps les surcoûts énergétiques.
  • L’élargissement du Droit Passerelle ainsi que l’élargissement des conditions d’accès au chômage économique. Nous voulons également permettre aux entreprises en difficulté de reporter le paiement des cotisations sociales.
  • Des moyens supplémentaires pour les services permettant aux entreprises et aux commerces d’avoir des conseils énergétiques ainsi qu’une accélération des procédures pour l’obtention de subsides générant des économies d’énergie (Pack Energie pour PME & non-marchand à Bruxelles par exemple). Chaque entreprise connaissant une explosion des coûts de l’énergie doit être accompagnée afin de mettre en place des mesures à court-terme et à moyen-terme.

Les Engagés veulent aussi particulièrement lever la double peine infligée aux commerces qui paient deux fois l’augmentation du prix de l’énergie : une fois dans leur facture et une deuxième fois dans l’indexation de leurs loyers.

Pour retirer cette pression injuste sur les commerces, Les Engagés proposent un nouvel Indice Bâtiment Performant qui découplerait l’indexation des loyers du prix de l’énergie. Cette mesure bénéficierait aussi aux particuliers.

Pour éviter que les locataires ne paient deux fois leur facture énergétique, ce nouvel indice différencié en fonction de la performance énergétique des bâtiments remplacerait l’Indice Santé actuellement utilisé pour les loyers[1].

[1] L’état publierait chaque année le nouvel Indice Bâtiment Performant. Il serait d’ailleurs plus intuitif à comprendre que l’utilisation d’un indice « Santé » pour indexer un logement. Une exception pour les biens listés au patrimoine, pour lesquels un niveau élevé de performance énergétique est difficile à atteindre, devrait être envisagée.

Concrètement, ce nouvel indice impliquerait un gel d’index pour toute passoire énergétique (PEB F ou G), un indice calculé sans composante énergétique pour les bâtiments de performance intermédiaire (PEB C, D ou E) et la prolongation de l’indice actuel pour les bâtiments performants (PEB A et B).

L’Indice Santé actuellement utilisé pour les loyers est obtenu par la soustraction de certains produits du panier de l’indice des prix à la consommation, à savoir les boissons alcoolisées, le tabac et les carburants, à l’exception du LPG. L’Indice Bâtiment Performant serait différencié par niveau PEB.

Les passoires énergétiques (PEB F et G) ne pourraient pas du tout indexer leurs loyers, à l’instar de ce qui se fait en France depuis Aout 2022. Les bâtiments de performance intermédiaire (PEB C, D et E) devraient, eux, utiliser l’index santé sans sa composante énergétique. L’indice ne changerait, en temps normal, pas par rapport à l’indice Santé pour les bâtiments très performantes (PEB A+, A et B). L’augmentation du cout de l’énergie domestique ne se fait en effet que peu ressentir pour les locataires de ces bâtiments tandis que leurs bailleurs doivent assurer la rentabilité des investissements qu’ils ont fait pour atteindre cette performance et un taux plus élevé d’indexation incite les bailleurs à faire des rénovations énergétiques.

Le tableau ci-dessous reprend le niveau de l’Indice Bâtiment Performant pour chaque niveau de PEB :

Un grand commerce avec un loyer annuel de 1.000.000€ pour un bâtiment de PEB C, D ou E sera épargné d’un surcout annuel de 37.100€ (loyer annuel de 1.059.000€ au lieu de 1.097.000€). Sans l’indice Bâtiment Performant, ce commerce pourrait se voir obliger de se séparer d’un collaborateur faiblement qualifié.

Le locataire particulier moyen Bruxellois avec un loyer mensuel de 1104€ pour un logement de PEB C, D ou E sera épargné d’un surcout mensuel de ~41€ (loyer mensuel de 1170€ au lieu de 1211€). Le locataire particulier moyen Wallon avec un loyer de 653€ pour un logement de PEB C, D ou E sera épargné d’un surcout mensuel de ~24€ (692€ au lieu de 716€).

Indice bâtiment performant

En plus d’aider chaque commerce individuellement, cela éviterait que la crise inflationniste ne tourne en crise économique

Les commerces physiques fournissent de l’emploi local, font vivre nos communes et assurent de la convivialité et du lien entre les gens. Ils font déjà face au commerce en ligne. Ils ont déjà difficilement surmonté la crise du COVID qui pourrait toujours resurgir. Ils doivent déjà faire face à des différences de prix défavorables avec les pays frontaliers. Empêchons d’enfoncer encore un clou dans le cercueil du commerce.

Il faut sauver les commerces, éviter qu’ils mettent la clé sous le paillasson avec, à la clé, des pertes d’emplois. Nous devons éviter que la crise énergétique, qui s’est mue en crise inflationnaire, ne termine en crise économique.

De plus, cette mesure éviterait que l’inflation ne monte encore plus ; chacun y gagnerait sans porter de grave préjudice aux bailleurs

Il y a aussi urgence pour éviter la spirale inflationniste ! L’inflation des loyers est jusqu’à aout 2022 restée pratiquement inchangée, autour de 3,73%, alors que l’inflation générale (IPC) grimpait à 9,94%. D’ici un an, l’indexation des loyers aux taux de l’indice santé actuel (9,7% en aout) risque de faire monter l’inflation générale à 10,4%, soit 0,5% de plus qu’aujourd’hui.

 

Cette augmentation se répercutera sur le reste des prix nourrissant une spirale inflationniste. Il faut enrayer cette spirale.

L’inflation en aout 2022 était à 9,94% mais l’inflation hors énergie était à 5,99%. En retirant la composante énergétique de l’indexation de tous les loyers, nous pourrions maintenir le niveau d’inflation générale à un niveau de 0,3% plus bas (10,11%). Réduire l’inflation de 0,3% points représente une économie de ~100€/an pour le ménage moyen dont le budget était de 35.209€ en 2020. TOUS les ménages finiront par en bénéficier, qu’il soit locataire ou propriétaire. On peut s’attendre à ce que l’impact de l’Indice Bâtiment Performant, qui un chiffrage plus précis, aura un impact de cet ordre de grandeur.

Ce que les bailleurs pourraient perdre par une réduction de l’indexation de leurs loyers, ils le récupèreront en partie par une réduction du niveau d’inflation générale. Ce renoncement partiel dans la personne des bailleurs servira à l’ensemble de la population, y compris eux-mêmes et leurs proches.

Par ailleurs, l’augmentation des loyers par l’indexation ne reflète pas l’augmentation des charges des bailleurs. Leurs charges avant impôt ne représentent qu’un pourcentage minoritaire du loyer (précompte immobilier, frais de gestion, travaux, …). L’augmentation des charges est bien moins importante que l’augmentation du loyer dégageant ainsi un surprofit pour les bailleurs. Si le bailleur a acheté son bien grâce à un emprunt bancaire à taux fixe, l’indexation devient une rente. Les bailleurs commerciaux font leur meilleure année alors que des locataires ont la tête sous l’eau.

Enfin, cette mesure inciterait les bailleurs à rénover leurs propriétés et contribuerait ainsi à la lutte contre le dérèglement climatique

Les bailleurs n’ont actuellement peu ou pas d’incitants d’investir dans la performance énergétique de leurs bâtiments. Cette mesure leur donne cet incitant en liant davantage leurs revenus locatifs à la performance énergétique du bâtiment.

Cela accélèrerait la rénovation du parc immobilier qui représente actuellement ~20% des émissions de CO2. Cela réduirait à terme notre dépendance aux énergies fossiles importées et permettrait une plus grande autonomie stratégique à la Belgique.

En 1994, l’introduction de l’indice Santé marquait notre préoccupation légitime pour les problèmes de Santé, en visant l’abus d’alcool et de pollution. En 2022, face à la crise climatique, il est normal qu’un nouvel indice reflète notre grave préoccupation pour le climat.

D’une pierre deux coups : profiter de la crise énergétique pour répondre à la crise climatique.

Cette mesure encourage l’investissement immobilier plutôt qu’il ne le décourage. Les bailleurs particuliers qui n’auraient pas un capital suffisant peuvent faire appel à une série d’aides publiques pour financer la rénovation de leurs logements (jusqu’à 60.000€ d’emprunts à taux zéro de la Région Wallonne, primes à la rénovation dans toutes les régions, prime de remplacement de toiture en Région Wallonne…). Les Engagés proposent par ailleurs un mécanisme de tiers-investisseur.

#LeCourageDeChanger