
Que faire pour amener des personnes qui ne travaillent plus depuis de nombreuses années à retrouver un job ?
Pourquoi cette thématique est essentielle ?
En Belgique, sur environ 7 millions de personnes en âge de travailler (15-64 ans), seules quelque 4,945 millions sont effectivement en emploi parmi les 20-64 ans. Cela signifie qu’un grand nombre reste en dehors du marché du travail. On recense environ 190 000 chômeurs de longue durée, plus de 150 000 bénéficiaires du revenu d’intégration sociale en âge de travailler, et plus de 500 000 personnes en incapacité de travail depuis plus d’un an — une proportion significative étant touchée par des troubles de santé mentale. D’autres encore, comme les NEETS (jeunes sans emploi, ni en formation, ni en stage), échappent à ces catégories et ne sont pas toujours comptabilisés. La situation est particulièrement préoccupante dans certaines régions, notamment à Bruxelles, en Wallonie, ainsi que dans des provinces comme le Hainaut ou Liège.
Derrière ces chiffres se cachent des réalités de vie complexes. Pour certaines personnes, le non-emploi résulte d’un accident de parcours, d’un burn-out, d’un problème de santé, d’une séparation, ou simplement de l’éloignement progressif du monde du travail. Le retour à l’emploi peut alors être freiné par un manque de confiance, des compétences dépassées, la peur de perdre des aides sociales ou des contraintes familiales et logistiques (garde d’enfants, mobilité, isolement géographique). Dans d’autres cas, ce sont des difficultés liées à la santé mentale, à des addictions ou à un âge jugé “trop avancé” qui rendent l’embauche plus compliquée.
Entre volonté de rebond et réalités du terrain
Les politiques actuelles misent sur l’activation des demandeurs d’emploi à travers des formations, de l’accompagnement personnalisé ou encore des stages. Mais les résultats restent limités : seulement 4 chômeurs de longue durée sur 10 retrouvent un emploi après une formation. Par ailleurs, certaines personnes se retrouvent piégées par les mécanismes d’aides sociales cumulées. Reprendre un emploi peut alors, paradoxalement, se traduire par une perte de revenus ou de droits, rendant le retour au travail financièrement peu avantageux.
Bien sûr, il existe aussi des situations d’abus ou de fraude, mais elles restent minoritaires. La majorité des personnes concernées aspirent à retrouver une activité, mais doivent surmonter des freins personnels, sociaux, administratifs ou économiques. Certaines ne maîtrisent pas la langue, d’autres n’ont plus de réseau professionnel, et beaucoup ne disposent pas des moyens de transport nécessaires pour se rendre jusqu’à un emploi.
Dans ce contexte, la pénurie de main-d’œuvre actuelle pourrait être une opportunité à saisir. La Belgique compte plus de 140.000 postes vacants, notamment dans les secteurs de la construction, des soins de santé, de l’industrie technologique ou encore de l’horeca. Cela ouvre la porte à de nouvelles passerelles vers l’emploi pour les personnes aujourd’hui inactives. Cependant, cela suppose d’adapter les politiques de formation, de soutien et de réinsertion, tout en tenant compte des fragilités, des compétences, et des aspirations des personnes concernées.
Certaines expériences à l’étranger montrent que des approches différentes peuvent fonctionner. En Finlande, des programmes de mentorat ont réduit le chômage de longue durée de 25 %. Aux Pays-Bas, des accompagnements intensifs sur le terrain ont obtenu des résultats encourageants.
Une question de société essentielle
Ce sujet soulève de nombreuses interrogations, au cœur des débats sociaux et politiques actuels :
- Faut-il renforcer les incitants pour les employeurs afin qu’ils embauchent des profils éloignés du marché du travail ?
- Comment éviter les pièges à l’emploi et rendre les transitions plus justes ?
- Quelle place donner à la santé mentale, à la formation continue, à la mobilité ou à la lutte contre la stigmatisation ?
Face à ces constats, une question se pose : Que faire pour amener des personnes qui ne travaillent plus depuis de nombreuses années à retrouver un job ?
Le défi est de taille : il ne s’agit pas seulement de répondre aux besoins des entreprises, mais de reconstruire des trajectoires de vie durables et dignes pour celles et ceux qui ont longtemps été éloignés de l’emploi. Il faudra sans doute repenser l’accès à la formation, à la mobilité, à la santé mentale, et lutter contre la stigmatisation pour construire une société plus inclusive.
Pourquoi ce débat ?
Cette contextualisation a pour objectif de nourrir la réflexion collective dans le cadre du processus participatif annuel autour des thèmes de réflexion. Le but de cette démarche n’est pas de pointer du doigt ou de simplifier un sujet complexe, mais bien d’écouter les expériences, de réfléchir ensemble et de proposer des solutions inspirantes et positives. Nous comptons sur vous pour enrichir cette démarche avec vos idées, vos expériences et vos initiatives !

Dans le cadre de son processus annuel de réflexion, Les Engagés invitent toutes et tous à contribuer à l’actualisation de notre projet politique. En complément des événements organisés sur le terrain dans les bassins de vie, vous pouvez contribuer en ligne à cette thématique!
Vos idées viendront alimenter les échanges locaux ainsi que les travaux du groupe de travail en charge d’élaborer des propositions concrètes. Chaque contribution compte !
Le rôle des Président.e.s des Groupes de travail
Les président·e.s des Groupes de travail occupent une place essentielle dans notre démarche participative. Désignés pour leur expertise et leur connaissance approfondie de la thématique, ils et elles ont pour mission de piloter la réflexion, d’animer les échanges au sein de leur groupe et de structurer les contributions. Ces dernières émanent des débats organisés dans les bassins de vie ainsi que des réponses recueillies via notre site. Les président·e.s veillent à faire émerger des recommandations claires, cohérentes et ambitieuses, qui seront ensuite soumises à l’Assemblée politique et à la Convention annuelle pour nourrir le projet du Mouvement.

Isabelle Hansez
Isabelle Hansez est députée fédérale à la Chambre depuis le 9 juin dernier. Elle est notamment membre effective de la commission Affaires Sociales, Emploi et Pension, où sont abordées les questions d’intégration sociale, de droits de protection sociale et de politiques relatives aux incapacités de travail. Elle est psychologue du travail de formation et est professeur extraordinaire à l’Université de Liège. Spécialiste du burnout et des affections mentales liées au travail, elle a supervisé et coordonné pendant 30 ans un nombre important de recherches sur la prévention des risques psychosociaux et la promotion du bien-être au travail, dont la qualité du retour au travail. Elle est intervenue dans de très nombreuses entreprises sur la question des conditions de travail et connait donc bien la réalité organisationnelle des entreprises, en ce compris les nouvelles formes d’organisation du travail et les nouvelles formes d’emploi.