PAC : écouter les agriculteurs pour préparer l’avenir

La Politique Agricole Commune (PAC) est au cœur de l’avenir de notre agriculture. En Wallonie, elle conditionne directement le revenu des agriculteurs, la vitalité de nos campagnes et la transition écologique. Complexe, parfois jugée injuste, et surtout fragilisée face au risque de réductions budgétaires, l’avenir de la PAC inquiète.

C’est dans ce contexte que nous avons organisé une matinée d’échanges avec les syndicats agricoles (FWA, FJA, FUGEA, UNAB), Canopea, des représentants politiques et des citoyens. L’objectif : faire le bilan de la PAC actuelle et réfléchir à la prochaine réforme, attendue d’ici 2030.

Des acquis mais une PAC sous tension

En Wallonie, plusieurs points positifs sont salués : un deuxième pilier solide qui soutient le développement rural, des écorégimes qui rémunèrent des pratiques vertueuses, et une reconnaissance de la biodiversité dans le Plan stratégique wallon. Mais ces acquis sont fragilisés par les menaces budgétaires. La prochaine PAC pourrait perdre entre 22 et 35 % de ses moyens. Cette baisse drastique fait peser un risque majeur sur le renouvellement des générations, les aides à la conversion bio et la transition agroécologique.

À cela s’ajoutent d’autres préoccupations : prix exorbitant du foncier, gouvernance trop éloignée du terrain, règles complexes et inégalitaires. Pour beaucoup d’agriculteurs, la PAC est devenue une « lasagne » administrative décourageante.

Des attentes claires du terrain

Les échanges ont fait émerger des priorités partagées. La première est la définition de l’« agriculteur actif », essentielle pour cibler les aides vers celles et ceux qui produisent réellement et qui s’engagent dans des modèles durables. La seconde concerne le foncier : réformer le bail à ferme, encadrer la spéculation et faciliter la transmission des terres apparaissent comme des urgences, tant pour les jeunes que pour les cédants.

La jeunesse agricole reste d’ailleurs un point central. Les aides à l’installation existent, mais elles sont insuffisantes et trop vite épuisées. Beaucoup de jeunes motivés voient leurs projets bloqués faute de moyens. Garantir un prix rémunérateur, accompagner la transmission des exploitations et simplifier les démarches administratives sont des leviers incontournables pour préparer l’avenir.

Climat, environnement et compétitivité : trouver le bon équilibre

Sur le plan environnemental, les acteurs saluent la reconnaissance de la biodiversité et l’introduction d’outils comme l’indicateur C-durable, qui permet de mesurer la performance économique et écologique des fermes. Mais ils alertent sur le risque d’objectifs affaiblis. La réduction des pesticides, l’extension des surfaces bio et la neutralité phyto restent des horizons nécessaires.

Face aux dérèglements climatiques, la PAC doit aussi renforcer les solutions naturelles – haies, arbres, couverts végétaux – qui allient adaptation et résilience. Un système robuste d’assurance multirisque devrait par ailleurs être développer pour espérer protéger les exploitations contre la sécheresse, les inondations ou les maladies animales.

L’équilibre entre ambitions environnementales et compétitivité reste par ailleurs au cœur des inquiétudes : les règles du commerce internationales doivent être ajustées pour que les agriculteurs ne soient plus mis en concurrence déloyale avec des producteurs étrangers soumis à des normes sociales, environnementales ou phytosanitaires plus faibles.

Une gouvernance plus proche et plus démocratique

Enfin, un message fort ressort : la PAC ne doit pas être imposée « d’en haut ». Elle doit être construite avec les agriculteurs, leurs syndicats et la société civile. Son succès dépend de sa lisibilité et de sa légitimité démocratique.

Le colloque était l’occasion pour Les Engagés de rappeler leur vision selon laquelle l’avenir de la PAC doit reposer sur trois piliers clairs : un budget solide, garant d’un revenu digne pour les agriculteurs ; une gouvernance concertée, ancrée dans les réalités du terrain ; et une orientation résolue vers la durabilité, conciliant alimentation, environnement et justice sociale.

Nous défendrons une PAC qui redonne de la confiance aux agriculteurs wallons et de la clarté aux citoyens, une PAC juste et tournée vers l’avenir.